L'autonomie alimentaire en Corse : une utopie?

C’est en lisant sur FB l’article d’un monsieur qui raconte le rendement de son potager familial que j’ai eu envie de « creuser » le sujet… Il nous explique, chiffres à l’appui, que les fruits, les légumes et les céréales qu’il a plantés dans son jardin, malgré d’excellentes performances et toute sa bonne volonté n’apportent pas tous les nutriments nécessaires à sa petite famille… Soit ! Mais faut-il jeter le bébé avec l’eau du bain pour autant ?
Bien sûr que non !
Comme l’expliquent Sabine Becker et François Rouillay * c’est même l’inverse. L’autonomie alimentaire se réalise dans la mise en place de circuits courts, alternatifs à ceux de la grande distribution qui nous ont coupés du rapport pourtant vital que nous entretenons avec ce qui nous nourrit. Il ne s’agit pas de vivre en autarcie, mais de restaurer des liens avec les producteurs. S’engager vers l’autonomie alimentaire ce n’est pas revenir en arrière, ce n’est pas faire craindre de mourir de faim s’il pleut trop ou pas assez… Pas du tout passéistes, mes gourous, en la matière… Ouf ! Parce que la nostalgie, moi, c’est pas trop mon truc, en fait. L’autonomie alimentaire n’est pas synonyme d’autarcie, c’est même l’inverse !
La nécessaire valorisation des terres agricoles
Eux, Sabine Becker et François Rouillay, je les ai découvert à travers un article publié par Corse Net infos, à la suite d’une requête Google. Le titre « Autonomie alimentaire en Corse pour 2020, c’est possible ! » m’a évidemment donné envie de cliquer. L’article date de 2018 et en 2020 notre autonomie n’est toujours que de 4 %... Whaou ! On n’a pas beaucoup avancé. Il doit donc y avoir un problème quelque part…
C’est que l’autonomie alimentaire, comme ils l’expliquent est liée à un territoire. Elle est intrinsèquement liée à aux politiques territoriales, nationales comme régionales. L’autonomie alimentaire c’est évidemment un sujet politique…
Alors, quelle priorité pour notre île ? Le tourisme qui nous entretient dans une relation de dépendance ou le redéploiement de notre patrimoine agricole ? La crise sanitaire nous donne bizarrement un élément de réponse. Vive la pandémie ? Non, bien sûr. Mais la question posée par Recylcorse résonne plus fort depuis le printemps dernier : « Dans vingt ans mieux vaux que nos enfants nous disent merci plutôt que nous ayons à leur demander pardon. Car quelle Corse laissons-nous aux enfants et quels enfants laissons-nous à la Corse ? ». C’est bien dit. Au passage, saluons tous ceux et celles qui se battent depuis des années pour la valorisation des terres agricoles : congratulations spéciales à l’association U Levante et à AFC Umani à travers son programme Terranea.
Commencer par prendre soin de soi !
En fait, l’utopie n’est pas l’autonomie alimentaire, mais de croire bon de s’en remettre autorités supérieures pour gérer notre alimentation (et plus largement des tas d’autres sujets nous concernant). Il semblerait qu’elles-mêmes aient perdu la main sur beaucoup de choses. Pour autant, ce n’est pas si simple de s’affranchir de leurs tutelles, notre marge de manoeuvre se rétrécissant de jour en jour sans compter la fâcheuse tendance humaine à faire porter les responsabilités aux autres.
Or, l’autonomie alimentaire, comme l’expliquent de façon convaincante Sabine Becker et François Rouillay commence par un travail sur soi. Une prise de conscience, en fait. Prise de conscience des effets de la mondialisation qui détruit notre rapport à ce qui nous nourrit pour nous servir des aliments dont la principale vertu est d’alimenter des actionnaires. Prise de conscience intime du lien que chacun entretient avec ce qui le constitue, à savoir avec ce qu’il mange. Prise de conscience de soi tout simplement. Ca commence par un « savoir être », condition nécessaire pour fait taire le consommateur et faire lever le nez au citoyen dans le partage des savoir faire de façon à déboucher sur un nouveau savoir-vivre. C’est un processus… un peu long mais qui en vaut la peine. Pour en savoir plus, je vous invite à méditer sur la carte méthodologique des étapes mènent à l’autonomie alimentaire.

Et à regarder la vidéo de Sabine Becker et François Rouillay … Elle dure moins de 5 min. Qu’est ce que c’est 5 minutes ? Et en plus, y a plus rien à lire, juste à regarder et écouter !
Pour conclure, à la Pivarella nous n'avons pas pour ambition de nourrir tous les habitants de la Pive di Lota. Seulement de partager des savoir-faire, pour retrouver un peu de notre autonomie de conscience.
Vous partagez notre approche, faites-le nous savoir, en nous laissant vos coordonnées.
Envoyez nous un mail : lapivarella@gmail.com
Sylvia Cagninacci, présidente de La Pivarella
* auteurs du livre « en route vers l’autonomie alimentaire » paru en 2020 chez Terres Vivantes